Caen est mentionné
pour la première fois dans deux actes du duc de Normandie
Richard II (996-1026) en 1025 ou 1026, sous les vocables de
Cadon et de Cadumus. Dans le douaire consenti en 1026 par
son fils aîné et successeur Richard III (1026-1027)
à sa femme Adèle, apparaît la Villam quae
dicitur Cathim supra fluvium Olnae (le bourg que l'on appelle
Cathim sur le fleuve Orne). Le texte évoque ses églises,
ses vignes, ses prés, ses moulins, son marché,
son tonlieu, son port et toutes ses dépendances. Nous
entrevoyons derrière ces quelques mots une activité
économique déjà conséquente.
Mais c'est au duc
Guillaume le Bâtard (1035-1087), futur conquérant
de l'Angleterre, que Caen dut son réel essor. Après
sa victoire sur ses vassaux conjurés au Val-ès-Dunes
(1047), le jeune prince souhaita affermir son autorité
dans la région. Il délaissa quelque peu les
lieux de résidence traditionnels de ses ancêtres
(Rouen, Fécamp
et Lillebonne notamment), pour combler Caen de ses bienfaits.
Il y fonda avec son épouse deux abbayes (abbaye aux
Hommes et abbaye aux Femmes) et la forteresse avec son palais
vers 1060.
Le château
de Caen devint très vite l'un des centres du pouvoir
en Normandie. Henri Ier Beauclerc (1106-1135 en Normandie)
dota l'ensemble castral d'une nouvelle aula (salle de l'Echiquier)
et d'un grand donjon quadrangulaire. Henri II Plantagenêt
(1150-1189 en Normandie) y effectua plusieurs séjours.
En présence de ses fils Richard (futur Cur de
Lion) et Jean (Sans Terre), il y réunit près
de mille chevaliers le jour de Noël 1182.
Philippe Auguste
enleva le Château-Gaillard
au printemps 1204. Caen tomba entre ses mains dans la foulée,
quelques semaines seulement avant Rouen.
Le Capétien y imprima sa marque en construisant autour
du grand donjon une enceinte quadrangulaire.
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La guerre de Cent
Ans apporta son cortège de misère. La ville
fut pillée en 1346 par l'armée d'Edouard III
d'Angleterre (1327-1377), mais le château ne tomba pas.
Henri V de Lancastre (1413-1422) s'en empara en revanche après
un siège en règle (1417). Il fallut attendre
le 1er juillet 1450 pour que le capitaine français
Dunois reçoive les clefs de la ville. Charles VII y
effectua une entrée triomphale le 6 août suivant.
Caen n'en avait pas
pour autant terminé avec les affres des conflits. Les
Huguenots prirent la forteresse et saccagèrent les
églises de la cité en 1563. Louis XIII assiégea
une coalition de nobles rebelles réfugiée dans
les vielles murailles (1620). Le château accueillit
ensuite une garnison permanente qui s'illustra sinistrement
en 1735, ouvrant le feu sur une population affamée
au bord de la révolte.
La Convention (1793)
puis Napoléon Ier (1811) envisagèrent, sans
la réaliser, la destruction de la citadelle. Le donjon
fut cependant démantelé entre 1809 et 1819.
Le 36e Régiment d'Infanterie y établit ses quartiers
à partir de 1876, bientôt rejoint par le 129e
Régiment d'Infanterie. Plusieurs casernements s'élevèrent
à l'aube du XXe siècle. Les militaires nationaux
abandonnèrent la place au lendemain de la défaite
de Juin 1940. Elle connut son ultime supplice durant les lourds
bombardements de 1944.
Le château
s'ouvrit au tourisme après guerre. Fouillé par
le doyen Michel de Boüard, pionnier de l'archéologie
médiévale en France, de 1956 à 1966,
il abrite désormais les riches collections des musées
de Normandie et des Beaux Arts.
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