Le château,
bâti en granit sur un éperon barré, dessine
un quadrilatère irrégulier cantonné aux
angles de tours cylindriques et enserrant primitivement une
petite cour. La tour du Maure, plantée dans l'angle
nord-est, est la plus ancienne (XIIIe siècle) et fait
office de donjon. Les trois autres (tour du Croisé,
tour Sybil, tour du Chat) furent édifiées aux
XIVe et XVe siècles. C'est dans la tour du Chat que
Chateaubriand logeait enfant. Tours et courtines furent dotées
de mâchicoulis au XVe siècle. On observe des
mâchicoulis de type breton (en pyramide renversée)
et des mâchicoulis classiques à degrés.
Chateaubriand et
Combourg :
Mais c'est à
François-René de Chateaubriand en personne que
nous laissons le soin de présenter son domaine. Ainsi
le découvrit-il pour la première fois, à
l'occasion de vacances, en 1776 : " En sortant de l'obscurité
du bois, nous franchîmes une avant-cour plantée
de noyers, attenante au jardin et à la maison du régisseur
; de là, nous débouchâmes par une porte
bâtie dans une cour de gazon, appelée la Cour
Verte. A droite étaient de longues écuries et
un bouquet de marronniers ; à gauche, un autre bouquet
de marronniers. Au fond de la cour, dont le terrain s'élevait
insensiblement, le château se montrait entre deux groupes
d'arbres. Sa triste et sévère façade
présentait une courtine portant une galerie à
mâchicoulis, denticulée et couverte. Cette courtine
liait ensemble deux tours inégales en âge, en
matériaux, en hauteur et en grosseur, lesquelles tours
se terminaient par des créneaux surmontés d'un
toit pointu, comme un bonnet posé sur une couronne
gothique.
Quelques fenêtres
grillées apparaissaient çà et là
sur la nudité des murs. Un large perron, raide et droit,
de vingt-deux marches, sans rampes, sans garde-fou, remplaçait
sur les fossés comblés l'ancien pont-levis ;
il atteignait la porte du château, percée au
milieu de la courtine. Au dessus de cette porte on voyait
les armes des seigneurs de Combourg et les taillades à
travers lesquelles sortaient jadis les bras et la chaîne
du pont-levis. "
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Le jeune homme fut
relégué par son père dans l'une des tours
du château, la plus isolée et reculée
de toutes, appelée aujourd'hui tour du Chat. Dans ses
Mémoires, il raconte que " les gens étaient
persuadés qu'un certain comte de Combourg, à
jambe de bois, mort depuis trois siècles, apparaissait
à certaines époques, et qu'on l'avait rencontré
dans le grand escalier de la tourelle ; sa jambe de bois se
promenait aussi quelquefois seule avec un chat noir. "
C'est donc avec la peur au ventre que l'enfant devait regagner
seul ce qu'il nommait " mon donjon ". " La
fenêtre de mon donjon s'ouvrait sur la cour intérieure
; le jour, j'avais en perspective les créneaux de la
courtine opposée, où végétaient
des scolopendres et croissait un prunier sauvage. Quelques
martinets qui, durant l'été, s'enfonçaient
en criant dans les trous des murs, étaient mes seuls
compagnons. La nuit, je n'apercevais qu'un petit morceau de
ciel et quelques étoiles. Lorsque la lune brillait
et qu'elle s'abaissait à l'occident, j'en étais
averti par ses rayons, qui venaient à mon lit au travers
des carreaux losangés de la fenêtre. Des chouettes,
voletant d'une tour à l'autre, passant et repassant
entre la lune et moi, dessinaient sur mes rideaux l'ombre
mobile de leurs ailes. Relégué dans l'endroit
le plus désert, à l'ouverture des galeries,
je ne perdais pas un murmure des ténèbres. Quelquefois,
le vent semblait courir à pas légers ; quelquefois
il laissait échapper des plaintes ; tout à coup,
ma porte était ébranlée avec violence,
les souterrains poussaient des mugissements, puis ces bruits
expiraient pour recommencer encore. "
Chateaubriand quitta
Combourg en 1786 et n'y revint qu'à quatre reprises.
Lors de son dernier passage, en 1801, il découvrit
un château emporté par la tourmente révolutionnaire
: " Si mes ouvrages me survivent, si je dois laisser
un nom, peut-être un jour, guidé par ces Mémoires,
quelque voyageur viendra visiter les lieux que j'ai peints.
Il pourra reconnaître le château ; mais il cherchera
vainement le grand bois : le berceau de mes songes a disparu
comme ces songes. Demeuré seul debout sur son rocher,
l'antique donjon pleure les chênes, vieux compagnons
qui l'environnaient et le protégeaient contre la tempête.
Isolé comme lui, j'ai vu comme lui tomber autour de
moi la famille qui embellissait mes jours et me prêtait
son abri : heureusement ma vie n'est pas bâtie sur la
terre aussi solidement que les tours où j'ai passé
ma jeunesse, et l'homme résiste moins aux orages que
les monuments élevés par ses mains. "
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