La vie religieuse
apparaît sur les bords de la " Fontaine qui guérit
", étymologie supposée de Fontaine-Guérard,
vers 1135. Un prieuré de femmes est à cette
date établi par le comte Amaury de Meulan, sire de
Gournay, propriétaire des terres alentours.
La fin du XIIe siècle
marque dans ce secteur un nouvel essor du mouvement monastique.
Richard Cur de Lion fonde en 1190 l'abbaye pour hommes
de Bonport, près du Pont-de-l'Arche. A peu près
à la même époque, sur requête de
l'archevêque de Rouen Gautier de Coutances, le comte
de Leicester Robert aux Mains Blanches fonde pour sa part
Fontaine-Guérard, destinée aux moniales. Dès
1207, l'abbaye est affiliée à l'ordre cistercien
et en 1218 se déroule la consécration de l'abbatiale
en présence de l'archevêque de Rouen Robert Poulain.
L'essentiel des bâtiments conventuels est achevé
en 1253. Les abbesses, essentiellement issues de l'aristocratie
locale, se succèdent jusqu'en 1789.
Un épisode
tragique survient au XVe siècle. Un seigneur des environs,
Guillaume de Léon, sire de Hacqueville, molestait régulièrement
son épouse, la pauvre Marie de Ferrières. Afin
d'échapper aux coups de son compagnon, Marie s'enferma
à Fontaine-Guérard et souhaita prendre le voile.
Mais Guillaume ne l'entendit pas de cette oreille, dépêcha
sur place ses hommes de main qui se chargèrent d'égorger
la malheureuse. En pénitence, Guillaume dut fonder
une nouvelle chapelle dans l'enceinte même de l'abbaye.
Il s'agit de la chapelle Saint-Michel, toujours visible de
nos jours au-dessus du cellier.
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La Révolution
met un terme à près de 600 ans d'existence.
La dernière abbesse, Marie-Madeleine-Eléonore
du Bosc de Radepont, voit la dissolution de la communauté
et la dispersion des douze moniales restantes. L'abbaye entame
alors son calvaire. Elle est achetée en 1792 par l'industriel
François Guéroult, " brillant esthète
" à l'instar du triste Jean-Baptiste Lefort, qui
sévit à peu près à la même
époque à Jumièges.
L'essentiel des bâtiments est détruit et les
pierres sont utilisées pour la construction d'une filature
de coton. Dès le milieu du XIXe siècle l'ensemble
se trouve déjà sévèrement endommagé.
Les propriétaires se succèdent jusqu'en 1937.
Le dernier d'entre eux, M. Colombel, lègue le domaine
à l'Armée du Salut. L'uvre caritative
entreprend la restauration du monument après la Seconde
Guerre Mondiale et en assure toujours la gestion.
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